Paix et sécurité
« Je me souviens très bien de la guerre civile au Libéria », déclare Elfreda Dennice Stewart, une femme officier de la Police des Nations Unies (UNPOL) servant au sein de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS).
Mes parents ont réussi - avec beaucoup de sacrifices de leur part - à me faire aller au lycée pendant une période de grande agitation dans mon pays. Après quoi j'ai commencé à occuper un certain nombre d'emplois pour aider financièrement », ajoute-t-elle.
Elfreda a tressé les cheveux et a donné des cours particuliers aux jeunes enfants de sa communauté, rentrant souvent chez elle tard le soir, craignant d'être violée à une époque où la violence sexuelle sévissait au Libéria.
Rêves brisés
Rachel Briggs, une autre femme officier d’UNPOL du Libéria déployée au Soudan du Sud, a une histoire similaire. « J'avais tellement de rêves, mais la guerre dans mon pays les a brisés. J'ai été séparée de ma mère en 1990 et jusqu'à aujourd'hui, je ne sais pas si elle est morte ou vivante. Je continue à la chercher, mais ma vie a évolué », révèle-t-elle.
Pour l’officier d’UNPOL Alfreda Tozay, ce sont les souvenirs des personnes tuées, des biens détruits et de la faim extrême qui résonnent encore.
« Le Libéria, quand je grandissais, était une saga sans fin d'horreurs. Mes parents n'avaient pas assez de nourriture pour nous, et j'allais dans la brousse, faire du charbon de bois pour le vendre dans les rues. Je vendais du pain sur le bord de la route. Mais quand même, il n'y avait jamais assez à manger », raconte-t-elle.
Mais leur vie a changé après le déploiement de l'ancienne Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) en septembre 2003. Le mandat de l'ONU au Libéria était de surveiller l'accord de cessez-le-feu après la deuxième guerre civile libérienne.
Mais les Casques bleus sur le terrain n'ont pas simplement négocié une paix durement gagnée pour le pays en difficulté; ils étaient une lueur d'espoir pour le peuple libérien, en particulier les femmes.
Elfreda, Rachel et Alfreda ont rejoint la formation policière de la MINUL et ont fait partie des premières femmes à rejoindre la Police nationale libérienne.
Aujourd'hui, ces femmes remarquables font partie du tout premier déploiement d'officiers d’UNPOL du Libéria dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies.
Le Soudan du Sud, et plus particulièrement Bor dans l'État de Jonglei, où toutes les trois sont en poste, occupe une place particulière dans leur cœur.
« Si nous pouvons le faire, vous le pouvez aussi »
« Quand je suis arrivée à Bor et que j'ai commencé à patrouiller parmi les communautés, je savais exactement ce qu'elles traversaient parce que moi et tout le peuple libérien avons souffert de la même manière », explique Elfreda. « Cela m'a placé dans une position unique pour nouer des liens avec le peuple sud-soudanais et calmer les tensions ».
« Quand ils entendent mes histoires, ils ont l'impression d'avoir trouvé une sœur. Je leur dis toujours : regardez où se trouvait le Libéria et regardez à quel point nous sommes pacifiques maintenant. Si nous pouvons le faire, vous le pouvez aussi », ajoute-t-elle.
Pour Rachel, faire preuve d'empathie envers les communautés sud-soudanaises qu'elle sert a été à la fois éprouvant et gratifiant. « Après ma première patrouille à Bor, je suis retournée à mon logement à la mission et j'ai pleuré », dit-elle.
« C'était comme regarder l'histoire se répéter au Soudan du Sud. Mais je savais que je pouvais faire une différence et apporter de l'espoir aux communautés vivant ici. Je leur raconte mon enfance, et je n'arrête pas d'insister sur un seul point : oublier le passé et s'unir pour construire un avenir meilleur pour vos enfants », déclare-t-elle passionnément.
« Notre expérience d'une guerre civile de 14 ans et l'impact qu'ont eu les soldats de la paix de l'ONU sont réels et tangibles pour les personnes que nous servons sur le terrain », ajoute Alfreda. « Nous avons tellement profité des soldats de la paix, et c'est notre honneur de servir maintenant dans cette jeune nation sous le drapeau bleu emblématique ».
Elfreda, Rachel et Alfreda faisaient partie des neuf officiers libériens de l'UNPOL qui ont récemment reçu la prestigieuse médaille des Nations Unies pour leur service à la cause de la construction d'une paix durable au Soudan du Sud.
« Être présélectionnée pour la MINUSS était un rêve devenu réalité et chaque jour, alors que nous renforçons les capacités de nos homologues locaux du service de police du Soudan du Sud, nous leur demandons de nous considérer comme un exemple de ce qu'un pays et ses femmes peuvent réaliser, avec l'aide de l'ONU », poursuit Rachel avec un sourire.
« Nous avons beaucoup appris des soldats de la paix de la MINUL. Maintenant, en tant que soldats de la paix de la MINUSS, il est temps pour nous de redonner au Soudan du Sud », conclut Elfreda.
« Pas de plus grande joie »
La cérémonie de remise des médailles à ces neuf policiers libériens exceptionnels a été marquée par un moment touchant, quand Murat Isik, chef d'état-major de l'UNPOL pour la MINUSS - qui avait auparavant servi au sein de la MINUL de 2004 à 2005 en tant qu'instructeur de l'Académie de formation des services de police libériens - a épinglé la médaille sur l'un de ses anciens cadets, Togba Massaquoi.
« Il ne peut y avoir de plus grande joie que de voir Togba servir avec compétence en tant que mon adjoint à la MINUSS, aidant à créer un Soudan du Sud plus pacifique et plus prospère. Togba et tous les lauréats du Libéria sont des exemples vivants du pouvoir de la paix », a déclaré M. Isik, avec éloquence.
Cette cérémonie émouvante a été suivie par la Commissaire de police de la MINUSS, Christine Fossen, et la Représentante spéciale adjointe ainsi que la Coordonnatrice résidente pour le Soudan du Sud, Sara Beysolow Nyanti, originaire du Libéria.